Fondateur du CIOFF, Fondateur du festival de Confolens
Tu sais, j'ai tout calé. Lo Gerbo Baudo ouvrira le cortège, le cercueil sera juste derrière. Et après, mes copains les pompiers. On partira de la maison pour aller jusqu'à la place de l'Hôtel-de-Ville. La flamme du festival brûlera dans un coin et quand le cortège arrivera, le Chant du Festival retentira.» Henri Coursaget a tout prévu. Homme de spectacle jusqu'au bout. Y compris quand il parle de son enterrement! Chorégraphié, imaginé, pensé, réfléchi, comme tous les spectacles qu'il a mis en scène.
Hier, le petit homme s'en est allé. Henri Coursaget est décédé à l'hôpital de Confolens, entouré de sa famille, à l'âge de 86 ans. Dans cette cité qu'il a tant chérie. Et à qui il a tant donné. Et apporté. Touché depuis longtemps par cette maladie que l'on ne nomme jamais, mais qui s'appelle cancer, Henri Coursaget, fidèle à lui-même, s'est battu. Jusqu'au bout. N'hésitant pas à balayer d'un revers de la main, quelques heures encore avant sa mort, les questions de l'ami de passage sur ces méchantes métastases qui l'avaient envahi pour s'enquérir fiévreusement de la campagne des cantonales. Livrant ses choix, ses espoirs, pour le bonheur futur de Confolens. Le reste n'ayant finalement que peu d'intérêt.
Cinquante ans de fusion passionnelle
C'est à Confolens qu'Henri Baptiste Barthélémy Coursaget a vu le jour. École primaire, collège, lycée à Confolens, comme il se doit. Puis études de pharmacie-biologie à l'université de Toulouse où se trouve déjà l'un de ses frères. C'est là qu'il croise un certain Louis Jouvet qui lui transmet tout le bonheur qu'il y a à monter en scène. Mais qui lui conseille quand même de faire sa pharmacie...
En 1958, alors qu'il a repris l'officine familiale depuis une petite dizaine d'années, Henri Coursaget se voit rattrapé par le comité directeur d'une petite manifestation bien sympathique qui vient de naître à Confolens et qui a attiré la foule sur les rives de la Vienne: les rencontres des «Folklores des pays d'ouest». L'éphémère premier président quittant Confolens, c'est à ce tout jeune pharmacien alors âgé de 34 ans que l'on confie le bébé.
Henri Coursaget le prendra en amour et ne l'abandonnera plus jamais. Même après avoir quitté son poste de président en août 2007.
Cinquante ans de présidence, cinquante ans d'engagement, cinquante ans de fusion passionnelle entre un homme, un festival, une ville. Un engagement total pour la paix dans le monde et l'amitié entre les peuples. Avec ce zest indispensable de folie, de naïveté et d'utopie. Henri Coursaget y croyait. Croyait qu'un Israélien et un Palestinien pouvaient se comprendre, qu'un Américain et un Russe, en pleine guerre froide, pouvaient s'écouter. Ne serait-ce que huit ou dix jours, le temps d'un festival. Le temps d'une danse.
Créateur du Conseil international des organisateurs de festivals de folklore (CIOFF), Henri Coursaget a été un ambassadeur infatigable de sa ville et de la Charente limousine dans le monde. Sans jamais se départir de sa bonne humeur et de sa joie de vivre. Sans jamais se prendre au sérieux, toujours à l'affût d'une plaisanterie, d'une facétie.
Quoiqu'«en retraite» - aurait-il détesté ce mot! -, il était toujours très à l'écoute de «son» festival, toujours présent pour donner un avis ou un conseil, ou tenir la buvette le 15 août! «Je n'aime pas les bilans, se plaisait-il à répéter. Je n'aime pas regarder dans le rétroviseur. Pour moi, le seul festival qui compte c'est celui qu'on est en train de préparer.»
L'homme pour qui la vie était un théâtre s'en est allé. Ivre d'aventures humaines toutes plus riches les unes que les autres.
Adieu l'artiste.